Accéder au contenu principal

NYT : La France face à une tourmente politique

 https://en.interaffairs.ru/article/nyt-france-faces-a-political-turmoil/

09.10.2025 •

Jordan Bardella, président du Rassemblement national, après un meeting à Paris.
Photo : Agence France-Presse

L'effondrement record d'un autre gouvernement confronte le président Emmanuel Macron et son pays à une crise qui s'intensifie, écrit le New York Times.

La brève et malheureuse histoire du dernier gouvernement français, dont le seul fait d’être un record de brièveté de mandat, est la chronique d’un désastre annoncé.

Sébastien Lecornu, qui a démissionné lundi après 28 jours comme Premier ministre, avait promis une « rupture » avec la politique d'une série de gouvernements éphémères, mais était lui-même l'incarnation de la continuité et de la persistance obstinée du président Emmanuel Macron à rester fidèle à son cercle intime de centre-droit.

Cela peut fonctionner lorsque le président contrôle le Parlement. Ce n'est pas le cas de M. Macron. L'Assemblée nationale est divisée en trois camps : l'extrême droite nationaliste de Marine Le Pen, la gauche et l'extrême gauche, représentées avec la plus grande véhémence par Jean-Luc Mélenchon, et un centre affaibli, dont la loyauté envers un M. Macron à mandat limité s'estompe.

Le résultat a été cinq gouvernements au cours des 21 derniers mois et le chaos.

Lorsque, après des semaines de consultations, M. Lecornu a dévoilé son nouveau cabinet dimanche soir, celui-ci s'apparentait à une reprise maladroite de l'ancien. L'inclusion de Bruno Le Maire, l'ancien ministre des Finances largement accusé d'avoir fait grimper la dette française à 4 000 milliards de dollars durant ses sept années de mandat, était une provocation. Ce gouvernement, mort-né, a duré 836 minutes.

Et maintenant ? M. Macron a annoncé lundi soir avoir demandé à M. Lecornu de rester en poste à titre intérimaire pendant 48 heures afin de trouver « une plateforme d'action et de stabilité pour le pays ». M. Lecornu a accepté, précisant qu'il informerait le président d'ici là de la possibilité d'une telle mesure.

« Nous dansons sur les ruines de nos institutions », a déclaré Alain Duhamel, éminent analyste politique et auteur, sur RMC. « Si M. Macron démissionne, ce sera la mort de la Ve République. »

Rares sont ceux qui s'attendent à ce que M. Macron démissionne, et il n'y est nullement obligé. Pourtant, il en est réduit à choisir la moins mauvaise des options les plus insupportables. L'incarnation actuelle de la Cinquième République ressemble en tout point à l'agonie de la Quatrième République, lorsque l'instabilité chronique du Parlement et du gouvernement conduisit Charles de Gaulle en 1958 à élaborer une Constitution privilégiant fortement le président.

M. Macron conserve ces pouvoirs considérables, mais il semble acculé, du moins si M. Lecornu échoue dans sa mission de la dernière chance. Il peut dissoudre le Parlement, ce qui entraînera probablement une forte hausse du soutien à Mme Le Pen et à son parti lors des prochaines élections. Il pourrait faire ce qu'il a refusé de faire et demander à un homme politique de centre-gauche de tenter de former un gouvernement. Ou il pourrait opter pour la même solution et espérer le miracle d'un résultat différent.

« Nous avons épuisé toutes les options pour former un gouvernement stable au sein de ce Parlement », a déclaré Anne-Charlène Bezzina, maître de conférences en droit public à l'Université de Rouen, lors d'un entretien. « La meilleure solution est donc des élections et une dissolution du Parlement, ce qui clarifiera au moins la volonté du peuple. »

L'extrême droite et l'extrême gauche de l'Assemblée nationale actuelle ne s'accordent guère sur d'autres points que la nécessité d'un changement plus que superficiel en France et une hostilité farouche envers M. Macron, dont le rôle prépondérant sur la scène internationale s'est accompagné d'un effondrement des fondements politiques nationaux. La France ressemble de plus en plus aux États-Unis de 2016, lorsque les citoyens ont baissé les bras, exaspérés, et opté pour le changement, n'importe quel changement, incarné par Donald J. Trump.

M. Macron est « plus que jamais dans le déni total de la situation politique », a déclaré Vincent Martigny, professeur de science politique à l'Université Côte d'Azur de Nice. « Nous sommes donc dans un blocage absolu. »

Impopulaire après plus de huit ans au pouvoir, alors qu'il lui reste environ 18 mois de mandat, M. Macron subit une pression constante de l'extrême gauche pour démissionner et de l'extrême droite pour convoquer des élections législatives.

« Il ne peut y avoir de retour à la stabilité sans un retour aux urnes et sans la dissolution de l'Assemblée nationale », a déclaré lundi à la télévision Jordan Bardella, le jeune protégé de Mme Le Pen.

Leur parti anti-immigration, le Rassemblement national, et ses alliés, détiennent actuellement 138 sièges à l'Assemblée nationale, qui en compte 577. Il leur faudrait plus que doubler ce score pour obtenir la majorité absolue de 289 sièges, un résultat improbable, mais pas impossible. Même en deçà de ce seuil, ils pourraient s'allier à l'extrême gauche pour abroger la loi impopulaire de 2023, votée par M. Macron, qui a porté l'âge de la retraite de 62 à 64 ans.

Mais une impasse persistante, même après de nouvelles élections, est aussi probable que n’importe quel autre résultat, et un retour sur la loi sur les retraites semblerait relever de la folie politique alors que le déficit budgétaire français est en pleine explosion.

Un problème fondamental est que, pendant des décennies, la Ve République a fonctionné soit avec une majorité claire au Parlement soutenant le président, comme pendant le premier mandat de M. Macron, soit avec une majorité claire s’opposant au président, comme lorsque Jacques Chirac était le président de centre-droit et Lionel Jospin le Premier ministre socialiste de 1997 à 2002. Cela ne fonctionne pas bien avec un Parlement fracturé.

En ce sens, la crise actuelle n'est pas seulement de nature politique, mais constitutionnelle. Sa résolution reste incertaine.


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Jacques Attali : "L'avenir de la vie" 1981 - Extrait .....et rectifications

HCR-HCE - CE N'EST PAS VOUS QUI ĒTES FOU

Nous avons désormais la preuve que les vaccins COVID endommagent les capacités cognitives