Conflits d’intérêt et corruption à l’Agence européenne du médicament

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Conflits d’intérêt et corruption à l’Agence européenne du médicament

Publié le 13/10/2021 à 14:17
L'argent des bisounours
Auteur(s): FranceSoir 

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TRIBUNE - La santé des Français mérite mieux que cette association de malfaiteurs.

Initialement, l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) appartenait à chaque État membre. Un règlement de 1993, remplacé par un règlement de 2004 régulièrement modifié, a institué une agence d’évaluation : l’Agence européenne des médicaments (EMA).

L’EMA se compose d’un conseil d’administration de 36 membres, dont la plupart représentent les États membres (le plus souvent le directeur ou président de leur agence nationale). Le conseil d’administration nomme un directeur exécutif entouré de sept comités d’experts.

L’agence fait partie de la vaste catégorie des organismes plus ou moins décentralisés, aux dénominations elles-mêmes variables (agence, office, observatoire, etc.) créées pour conseiller la Commission européenne sur des sujets techniques.

La Commission, en sa qualité d’institution politique, reste libre de suivre ou non ces conseils, et c'est elle qui octroie l’AMM. Mais, l’EMA disposant de la compétence d’expert, surtout dans le domaine médical, joue un rôle préparatoire crucial.

Cela semble invraisemblable, mais le budget de fonctionnement de cette agence (346 millions d'euros) provient à 85,70 % de redevances payées par l’industrie pharmaceutique et à seulement 14,30 % de financements publics de l’Union européenne…

En tant qu’agence de la Commission européenne, les obligations de l’EMA en matière de transparence et d’accès aux documents découlent de directives stipulant que tout document détenu par l’EMA dans le cadre de ses activités est de fait un document public.

Dans les faits, la revue Prescrire a montré que l’EMA refuse de communiquer de nombreux documents, et que ceux qui sont transmis sont largement caviardés.

Son manque de transparence a été dénoncé lors de son refus d’indiquer aux députés les bases sur lesquelles les laboratoires à l’origine des vaccins ont été choisis et le montant des prix payés pour ces vaccins.

La “prévisibilité” de l’EMA est si grande que l’industrie américaine nous l’envie, notamment le "think tank" néoconservateur Pacific Research Institute, financé par l’industrie des bio technologies, qui milite pour toujours moins d’intervention des pouvoirs publics. Et pour cause ! Dès le lendemain de son départ de l’EMA en 2011, le directeur exécutif Thomas Lönngren, rejoint le conseil d’administration de NDA Ltd, société de lobbying au service des firmes pharmaceutiques, qui l’a recruté en tant "qu'influenceur de premier plan".

Le pantouflage ou « revolving doors » est un fléau. Dans un secteur de la santé à la fois très lucratif et très réglementé, les firmes ont un grand intérêt à placer leurs hommes dans les agences publiques et à mettre en place cette stratégie d’entrisme.

L’italien Guido Rasi a ensuite été nommé directeur de l’EMA en 2011, puis forcé a démissionné par la Justice européenne pour conflit d’intérêt non déclaré, avant d’être renommé à nouveau directeur de l’EMA en 2015.

L’actuelle directrice, Emer Cooke, a passé sept ans au sein de l'EFPIA, le principal lobby de l’industrie pharmaceutique en Union européenne qui organise des rencontres au Parlement européen avec des représentants de GSK, Roche, Novartis, Pfizer...

Un audit européen de la Cour des comptes de 2012 confirme de graves problèmes de conflits d'intérêt au sein de l’EMA (et de 3 autres agences : l’EASA (sécurité aérienne) l’EFSA (sécurité alimentaire) et l’ECHA (sécurité vis-à-vis des produits chimiques).

Le rapport pointe de graves irrégularités, la direction de l’EMA favorisant la présence, dans les comités scientifiques, d’experts en conflit d’intérêts avec les compagnies pharmaceutiques dont ils évaluent les produits.

Le Canard Enchaîné a révélé que certains experts de l’EMA sont salariés ou possèdent des actions dans les entreprises pharmaceutiques dont ils sont censés évaluer les produits lucratifs.

Des lanceurs d’alerte ont dénoncé ce problème : « Depuis des mois, notre entreprise rémunère discrètement un expert pour qu’il fasse le lobbying de notre produit. La rémunération est exorbitante, mais le plus grave est qu’il officie comme expert à l’EMA. »

Dans l’affaire du Mediator, l’Inspection générale des affaires sociales a mis en cause plusieurs experts français, qui siégeaient à l'Agence européenne du médicament, dans l'interdiction tardive du Mediator et le drame sanitaire consécutif.

L’EMA propose elle-même, en toute opacité, aux firmes pharmaceutiques, des « conseils scientifiques » facturés pour les aider à faire passer leur dossier de demande d’AMM, notamment conditionnelles, comme celles des vaccins anti-covid (AMMc).

Or, les médicaments mis sur le marché de manière accélérée le sont souvent au détriment de la qualité de l'évaluation clinique. Pire, cette évaluation n'est pas suffisamment complétée non plus après commercialisation.

Un rapport de 2017 note « une acceptation générale de la corruption » au sein de l’EMA et :

- une acceptation générale de la corruption
- des structures de gestion inefficaces
- des mécanismes de financement inappropriés
- une répartition inégale des ressources

« L’industrie pharmaceutique tient fermement les rênes d’une vaste machine de lobbying, richement dotée, qui dispose d’un accès presque systématique aux décideurs de la Commission [...] et des institutions bruxelloises, y compris l’EMA».

En juin 2020, l’EMA prend la décision d’autoriser le remdesivir de Gilead.

La revue Prescrire commente : “Une fois de plus, l’EMA a manqué de rigueur dans sa relation avec les firmes, aux dépens des patients et soignants, laissés dans l’incertitude.”

Au mois d’octobre, suite à cette décision a priori insensée, la Commission signe un contrat mirobolant avec Gilead, alors que l’industriel vient de prendre connaissance de la dernière étude de l’OMS qui invalide l’efficacité de son traitement.

La santé des Français mérite mieux qu’une dictature sanitaire, elle mérite un pôle public des médicaments, une expertise publique transparente et indépendante, un processus décisionnel démocratique, et des politiques de santé intelligentes, bienveillantes et non coercitives.



Tribune tirée d'un fil Twitter, avec l'aimable autorisation de son auteur :


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