La mésange bleue, nouvelle alliée contre l’A69
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La mésange bleue, dont la nidification vient de suspendre certains travaux de l’A69, est un oiseau réputé bagarreur. Mais malgré ses facultés d’adaptation, le réchauffement climatique affecte sa reproduction.
Une mésange bleue. Longueur : 11,5 cm. Poids maximal : 12 g. Cette petite boule de plumes aura eu raison des velléités de destruction du bois de la Crémade à Saïx, dans le Tarn.
Depuis quelques jours, elle voletait et zinzinulait dans le bois, puis elle a commencé à faire des allers-retours, tenant en son bec mousses et plumes. Les opposants au projet de l’autoroute A69 Toulouse-Castres ont alors documenté ce qu’ils attendaient avec impatience : un couple de mésanges bleues construisait son nid dans l’un des chênes qu’ils défendaient depuis des semaines.
Or cette espèce est protégée depuis 1981, explique Maxime Zucca, ornithologue. Il est donc interdit de la perturber pendant sa période de reproduction « pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement de [ses] cycles biologiques », selon l’arrêté du 29 octobre 2009.
Le 22 mars, l’Office français de la biodiversité (OFB) a confirmé que ce bois était bien une zone à fort enjeu environnemental avec des nidifications avérées, interdisant tout abattage. Le bois de la Crémade est donc sauvé du défrichement… au moins jusqu’au 1ᵉʳ septembre prochain.
« Elle n’hésitait pas à sauter sur de plus gros oiseaux »
« C’est très réjouissant de voir qu’une chose aussi dérisoire qu’un nid de mésanges puisse aider à gagner une lutte », réagit Alessandro Pignocchi, auteur de bandes dessinées et ancien chercheur en sciences cognitives et philosophie de l’art. Dans son Petit traité d’écologie sauvage, la mésange bleue tient une place de choix : celle de la protagoniste rebelle et radicale, qui aime la castagne.
« À la mangeoire devant la fenêtre de mon atelier, j’ai vu qu’elle n’hésitait pas à sauter sur de plus gros oiseaux qu’elle pour gagner sa place. J’ai tout de suite aimé le côté tout mignon de cet oiseau, avec une esthétique qu’on imagine tout à fait dessinée sur le fond d’une assiette en porcelaine, et le contraste avec sa fascination pour l’émeute et la tête de cortège en manif », explique l’illustrateur.
Calotte et ailes bleues, joues blanches, dessous jaune… Cyanistes caeruleus, son nom scientifique depuis 2009 [1], a la réputation d’avoir un sacré caractère.
« Tout comme la mésange charbonnière, elle est bagarreuse, reconnaît Paola Dias, chercheuse et chargée de communication au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CEFE) de Montpellier. Quand on la tient dans la main, elle pique de façon très surprenante. Elle est assez teigneuse ! »
Opportuniste, elle peut choisir des lieux de nidification très variés : une cavité dans un arbre ou un mur, un nichoir ou même une boîte aux lettres… « C’est une espèce généraliste, très commune. On la trouve partout où il y a des arbres, aussi bien en ville qu’en forêt. Même dans les zones humides, l’hiver. Elle aime les roselières », dit Maxime Zucca. Contrairement à de très nombreux passereaux, ses effectifs sont même en hausse. Entre 2001 et 2019, sa population a augmenté en moyenne de 14,6 % selon les données du programme de Suivi temporel des oiseaux communs (STOC).
Alliée du jardinier
Sa chance, selon Paola Dias, est d’avoir un régime alimentaire varié. Si au printemps elle nourrit ses oisillons de chenilles et d’insectes, le reste de l’année, elle se satisfait de fruits, graines ou baies. « Le fait qu’elle n’ait pas un régime alimentaire strictement insectivore la rend moins sensible à l’effondrement des insectes », explique la chercheuse montpelliéraine. Pour Maxime Zucca, le nourrissage lui permet aussi de mieux passer l’hiver, une période de forte mortalité chez les petits passereaux.
La mésange bleue sait aussi adapter son menu en fonction des opportunités. Elle est par exemple devenue une adepte de la chenille de la pyrale du buis. « C’est une super alliée du jardinier, confirme Maxime Zucca. Elle mange les chenilles de nombreux papillons de nuit qui nuisent aux végétaux. Au verger, elle se régale de la chenille du carpocapse, un papillon qui s’attaque aux pommes. En ville, elle mange aussi les chenilles de la mineuse du marronnier. » Certaines municipalités ont même installé des nichoirs à mésange charbonnière et mésange bleue pour contrer l’invasion de chenilles processionnaires, qui a tendance à se généraliser sur tout le territoire avec le réchauffement climatique.
S’il s’accommode bien de ces changements de nourriture, le petit oiseau bleu voit tout de même son cycle de reproduction affecté par la hausse des températures. La nidification observée dès le 20 mars dans le bois de la Crémade en est une preuve, selon Paola Dias : « C’est assez exceptionnel de voir des nids dès le mois de mars. Généralement, la nidification arrive plutôt en avril. Mais sur 50 ans d’études [le laboratoire de Montpellier a mis en place un suivi des mésanges dès la fin des années 70], et encore plus sur les 20 dernières années, on constate qu’elle est de plus en plus précoce. Avec la mésange, on a sous les yeux un exemple de sélection naturelle très rapide. »
En raison de températures plus élevées, les arbres bourgeonnent plus tôt. Les chenilles dont les mésanges ont absolument besoin pour nourrir leurs petits apparaissent également plus tôt. D’où ce décalage de la reproduction. Une précocité qui tombe cette année à point pour l’opposition à l’A69.
Enfin, plus surprenant, les mésanges bleues seraient de moins en moins bleues en raison d’une hausse des températures et d’une baisse de la pluviométrie. Une étude publiée en juillet 2022 dans la revue The American Naturalist et fondée sur plus de 5 800 observations sur quinze ans pointe en effet une modification des colorations de la couronne bleue et du poitrail jaune, « une réponse plastique aux conditions environnementales », selon l’équipe de chercheurs dirigée par l’Université du Pays basque et le CEFE de Montpellier.
« Nos données suggèrent que la coloration est devenue plus terne et moins chromatique chez les deux sexes, […] les colorations ornementales pourraient devenir plus ternes en raison du réchauffement climatique. » Des changements qui pourraient à leur tour perturber les conditions de reproduction, avertissent les scientifiques, car les couleurs sont déterminantes au cours de la reproduction pour se repérer entre spécimens.
le blabla sur le changement climatique cause , prétendument, des problèmes de reproduction et/ou de changement de couleur des oiseaux est à lire avec un esprit critique . Il y a beaucoup trop de facteurs de pollution ( produits chimiques, ondes électromagnétiques , etc) qui pourraient être envisagés d'abord
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