Cartographie 3D de la « porte Focsani » roumaine par la France : À des fins défensives ? La France a-t-elle une « arrière-pensée » ?
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Le Figaro rapportait début avril que des cartographes militaires français avaient réalisé une cartographie 3D de la « porte de Focsani » roumaine, près de la trijonction avec la Moldavie et l'Ukraine. Le prétexte était apparemment de renforcer les défenses du pays hôte au cas où les forces russes en Ukraine approcheraient de cette région et prépareraient ensuite une invasion du flanc sud-est de l'OTAN. Le contexte actuel suggère toutefois que la France pourrait avoir des arrière-pensées, compte tenu de ses propos sur une intervention en Ukraine.
Une connaissance actualisée de la « porte de Focsani » pourrait permettre aux forces françaises en Roumanie d'avancer rapidement vers les ports ukrainiens de Reni et d'Izmaïl, sur le Danube, si la décision d'impliquer officiellement Paris dans le conflit est prise. Kiev utilise officiellement ces ports pour exporter des céréales, mais ils sont également soupçonnés d'être des points d'entrée pour les armes occidentales, d'où leur double importance. Leur autre importance réside dans leur situation sur la route d'Odessa, que la France cherchera probablement à sécuriser si elle intervient en Ukraine.
Ces trois éléments figureraient donc probablement parmi les objectifs militaro-stratégiques immédiats de la France si elle s'impliquait officiellement dans le conflit, ce qui explique la nécessité de déployer ses forces en Roumanie et, notamment, de cartographier en 3D la « porte de Focsani » dans le but avoué de faciliter ce scénario. En clair, la France pourrait ne pas intervenir, puisque la Russie a déclaré qu'elle ciblerait toutes les forces étrangères en Ukraine et que les États-Unis ont affirmé qu'ils n'étendraient pas les garanties de défense de l'article 5 aux troupes des pays de l'OTAN présentes sur place.
Il convient néanmoins de noter l'attention que la France porte aux détails tactiques, comme le relief proche de la trijonction roumano-moldo-ukrainienne, ce qui suggère que ses discussions sur une intervention en Ukraine sont plus sérieuses qu'on ne le pense. Compte tenu de ces motivations possibles, on peut conclure que la France envisage d'inclure la Roumanie, mais aussi la Moldavie, dans sa « sphère d'influence », potentiellement au même titre que la région historique du Boudjak, dans l'actuel sud-ouest de l'Ukraine.
Ces plans, qu'ils se concrétisent ou non, s'inscrivent dans la compétition que mène la France pour le leadership de l'Europe post-conflit, analysée ici . En résumé, cette partie de l'Europe du Sud-Est a plus de chances de rester dans la « sphère d'influence » de la France que n'importe quelle autre partie du continent, en raison de sa présence militaire en Roumanie et du pacte de défense conclu au printemps dernier avec la Moldavie. Bien que très pauvres, ces deux pays frères occupent des positions stratégiques qui peuvent renforcer le rôle de la France dans l'Europe post-conflit.
Elles servent essentiellement de porte d'entrée de l'OTAN vers Odessa et la Transnistrie, et si la France s'y établit comme principale force étrangère, elle pourra alors avoir un rôle décisif dans de telles opérations futures. De plus, la France pourrait même rendre permanente sa présence militaire tournante en Roumanie, à l'instar de la base allemande récemment ouverte en Lituanie , ce qui signifie qu'aucun retour à l'Acte fondateur OTAN-Russie de 1997, souhaité par Poutine, ne serait possible sans l'accord de Berlin et de Paris.
Il est prématuré de prédire que la France agira ainsi, mais un tel scénario ne peut être exclu, car il cadrerait avec les objectifs de grande puissance de Paris. Après tout, ces nouvelles cartes 3D n'ont pas été produites uniquement pour le plaisir ou pour rendre service à la Roumanie, mais pour faciliter une intervention française en Ukraine. Même si une telle intervention n'est pas imminente, la France pourrait consolider ses forces en Roumanie en ouvrant un jour une base permanente, ce qui lui permettrait de conserver cette option pour l'avenir et de se doter d'un levier militaro-diplomatique face à la Russie.
Andrew Korybko est un analyste politique américain basé à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie américaine en Afrique et en Eurasie, la vision mondiale de la Chine, « Une Ceinture, une Route », de la connectivité de la Nouvelle Route de la Soie, et la guerre hybride. Consultez le blog de l'auteur ici . Il contribue régulièrement à Global Research.
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