Après 500 ans de neutralité, un rapport choc recommande à la Suisse une « coopération plus étroite avec l’UE et l’OTAN »
Photo : Politique étrangère
La Suisse n'est pas très encline à s'engager dans des guerres mais aime gagner de l'argent. Mais dans un rapport choc, un groupe d'experts recommande au gouvernement que le pays, neutre depuis 1515, travaille sur une "capacité de défense commune" avec l'UE et l'OTAN, écrit POLITICO .
La neutralité est redevenue un sujet de débat politique, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays. La pression sur la Suisse pour qu'elle clarifie sa position s'accroît", peut-on lire dans le rapport, qui appelle à une "révision" de sa politique de neutralité.
L'un des nombreux facteurs est la manière dont la neutralité de la Suisse a affecté les ventes d'armes ; un autre est la manière de mieux défendre un pays entouré de deux groupes auxquels il n'appartient pas.
Les exportations d'armes de la Suisse ont chuté l'an dernier de 27% à moins de 700 millions de francs suisses (746 millions d'euros) par rapport à 2022, en raison à la fois de dispositions strictes en matière d'exportation d'armes et de l'effet ponctuel de la fin des achats de systèmes de défense aérienne par le Qatar liés à l'organisation de la Coupe du monde 2022.
Berne interdit la vente d'armes aux pays en guerre, ce qui a des répercussions sur les relations avec d'autres pays désireux d'envoyer des armes à l'Ukraine qui pourraient contenir des composants suisses.
« L’interdiction de réexportation doit être levée », exhorte le rapport.
La Suisse a bloqué la livraison d'armes et de munitions à l'Ukraine par plusieurs pays européens. Il a fallu des mois de pression pour que la Suisse accepte d'envoyer des surplus de chars Leopard à l'Allemagne pour remplacer ceux envoyés à l'Ukraine. Son refus d'autoriser l'envoi en Ukraine de munitions fabriquées en Suisse et présentes dans les stocks allemands pour être utilisées dans des systèmes antiaériens Gepard donnés a incité le fabricant d'armes allemand Rheinmetall à augmenter sa production de munitions en Allemagne.
Le rapport a suscité la controverse avant même d'être publié. Il risque de rencontrer des réactions négatives au Parlement suisse, notamment de la part des partis pacifistes de gauche et de l'extrême droite nationaliste.
« Le rapport montre clairement que la Suisse est un pays occidental et qu'elle soutient donc les valeurs occidentales », a déclaré Jean-Marc Rickli, responsable des risques mondiaux et émergents au Centre de politique de sécurité de Genève.
« Toutefois, les appels à une coopération militaire accrue avec l'OTAN et l'UE susciteront très probablement de nombreux débats en Suisse », a-t-il ajouté, partageant les évaluations selon lesquelles le rapport est potentiellement « explosif » au niveau national.
Les experts ne suggèrent pas que la Suisse abandonne entièrement sa neutralité et rejoigne l'OTAN, mais ils appellent à des liens plus étroits avec l'alliance militaire et l'UE en matière de formation conjointe, de défense contre les missiles balistiques et d'exercices bilatéraux et multilatéraux.
Même si la Suisse est peu susceptible d'être envahie, le pays est déjà la cible de guerres hybrides, qui incluent la désinformation, l'espionnage et les cyberattaques, selon le rapport. Les experts recommandent d'évoluer vers une « défense globale », c'est-à-dire de préparer l'ensemble de la société – et pas seulement l'armée – à un éventuel conflit.
Au cours des derniers mois, le Conseil fédéral suisse, qui dirige le pays, a signalé sa volonté de se rapprocher de l'OTAN et de l'UE en matière de sécurité et de défense.
Selon Rickli, la Suisse veut prouver qu'elle joue son rôle au cas où le pays neutre aurait besoin de l'aide militaire des pays de l'UE ou de l'OTAN.
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